Aftershift : la transformation du verre d’après service

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Ecrit par sylvie

Sylvie est une épicurienne passionnée, toujours en quête de nouvelles saveurs et de découvertes culinaires.

Le rideau tombe sur la cuisine. Les derniers bons de commande sont piqués, les feux s’éteignent un par un et le vacarme assourdissant du service laisse place à un silence presque irréel. Pour des milliers de professionnels de la restauration, ce moment marque le début d’un rituel aussi sacré que délicat : le verre d’après service.

Un instant de décompression essentiel, mais qui flirte souvent avec une culture de l’excès.

Et si ce rituel pouvait changer ? S’il pouvait offrir la même sensation de réconfort sans les conséquences négatives ? C’est le pari audacieux d’un collectif de chefs de renommée mondiale et d’une brasserie pionnière.

Ensemble, ils ont imaginé une bière qui n’est pas seulement une boisson, mais le symbole d’un mouvement pour le bien-être plus vaste pour prendre soin de ceux qui nous nourrissent. Explorons cette initiative qui pourrait bien redéfinir la fin de service.

Le verre d’après : Un Rituel Essentiel, un Piège Potentiel

Pour quiconque a déjà travaillé dans l’hôtellerie-restauration, le « shifty » ou « verre de décomp » est une institution. C’est bien plus qu’une simple boisson ; c’est un sas de décompression entre l’adrénaline du coup de feu et le retour à une vie normale.

Le Débriefing : Un Moment de Cohésion… Souvent Alcoolisé

Le verre post-service est le moment où la brigade se retrouve, où les tensions retombent et où les liens se tissent. On refait le match du service, on partage une anecdote, on évacue le stress accumulé après des heures passées debout, dans la chaleur et la pression. C’est un ciment social essentiel, un instant de camaraderie qui rend ce métier si unique et si humain.

Ce rituel permet de clore la journée de travail et de signaler au corps et à l’esprit que la bataille est terminée.

Quand le Rituel Dérape : Le Piège de l’Excès

Mais cette tradition a un revers. Pour beaucoup, un verre en entraîne un autre. Comme le décrit le chef Chris Shepherd, l’un des instigateurs du projet, le cycle est souvent le même : « Vous finissez à minuit ou une heure du matin, vous prenez ce verre, puis vous enchaînez au bar avec douze cocktails et vous vous retrouvez seul à la maison, complètement survolté ».

L’alcool, censé calmer, ne fait qu’entretenir un état d’excitation nerveuse.

Le problème est manifeste : quand votre journée se termine à 1h du matin, une décompression « normale » de cinq heures vous amène à 6h. C’est le début d’un cercle vicieux menant à l’épuisement, à l’isolement et à des problèmes de santé mentale, trop souvent passés sous silence au sein d’un secteur qui valorise l’endurance et la résilience à tout prix.

Aftershift : La Redéfinition du Plaisir Post-Service

Face à ce constat, Athletic Brewing, leader de la bière sans alcool, s’est associée à cinq chefs d’exception : David Chang, Chris Shepherd, Ashley Christensen, Sarah Grueneberg et Chris Cosentino. Leur objectif : créer une boisson qui conserve l’esprit du rituel tout en en supprimant les aspects nocifs. Le résultat s’appelle Aftershift.

Une Recette Conçue par les Chefs, pour les Chefs

Loin d’être un simple coup marketing, Aftershift est le fruit d’une véritable collaboration. Chaque chef a apporté sa contribution, affinant la recette au fil de multiples dégustations. Le résultat est une bière sans alcool (moins de 0.5%) à la robe dorée, brassée avec des feuilles de combaque et du yuzu.

Elle est vive, légèrement acidulée et extrêmement rafraîchissante, avec une finale nette et seulement 55 calories. Elle a été conçue comme la récompense idéale après un effort intense.

L’Essence du Rituel, Sans les Inconvénients

L’idée ingénieuse d’Aftershift n’est pas de supprimer le verre d’après service, mais de le réinventer. Elle offre une alternative saine et délicieuse qui permet de marquer la fin de la journée, de partager un moment avec ses collègues, mais sans l’alcool.

C’est l’occasion de vraiment « redescendre » et de prendre soin de soi, plutôt que de sombrer dans l’épuisement. C’est choisir la récupération plutôt que la gueule de bois. ✅

Un « Après-Service » Universel

Si cette bière a été pensée pour les cuisiniers, son concept résonne bien au-delà des cuisines professionnelles. Comme le dit si bien le chef Shepherd : « Un ‘shift’, peut désigner n’importe quoi ». Cette boisson s’adresse à tous ceux qui cherchent à s’offrir une petite récompense personnelle, un moment de pause mérité et savoureux.

Un Engagement Tangible pour la Santé Mentale en Cuisine

L’initiative ne s’arrête pas à la création d’une boisson. Aftershift est le porte-étendard d’une cause plus significative : le soutien à la santé mentale des travailleurs de la restauration, un secteur où le bien-être psychologique a longtemps été le grand oublié.

Soutien à la Southern Smoke Foundation

Une partie des bénéfices des ventes d’Aftershift, à hauteur de 46 000 euros, est directement reversée à la Southern Smoke Foundation. Fondée en 2015 par le chef Chris Shepherd, cette organisation à but non lucratif apporte son aide aux travailleurs du secteur de l’alimentation et des boissons en situation de crise, qu’elle soit financière ou psychologique.

« Behind You » : L’Accès Gratuit aux Soins Psychologiques

L’argent récolté soutient plus spécifiquement le programme « Behind You« , lancé par la fondation. Cette initiative offre un accès gratuit à des soins de santé mentale pour tous les professionnels du secteur sur plus de dix États américains. Chaque personne éligible peut bénéficier de vingt séances de thérapie, financées par la fondation.

Elle constitue une aide tangible, immédiate et vitale pour des personnes qui se retrouvent souvent démunies face à leur détresse.

Cette bière n’est donc plus qu’un simple produit ; c’est un outil de financement pour un changement structurel. Elle démontre qu’il est possible d’allier plaisir, commerce et engagement social.

Aftershift est davantage qu’une nouvelle boisson sur le marché. Elle est le reflet d’une prise de conscience collective. Menée par des chefs qui ont eux-mêmes connu la pression et les excès de cet environnement, cette initiative montre que le changement vient de l’intérieur.

Elle propose une orientation novatrice où la performance ne se fait plus au détriment de la santé, et où le soin de soi devient la nouvelle norme.

Cette dynamique nous incite tous à réfléchir à nos propres rituels de décompression. En choisissant des alternatives plus saines, non seulement nous prenons soin de nous, mais nous contribuons à un changement de culture plus large.

Et vous, pensez-vous qu’une telle initiative peut réellement transformer les habitudes d’un secteur aussi exigeant ?

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